vendredi 20 décembre 2013

Deux semaines en Tasmanie, partie 2

Bien, maintenant que le mois de décembre est confortablement installé et que les pensées du réveillon de noël au coin du feu ont chassées celles déjà bien lointaines des après-midis estivales passées à lézarder sur la plage, je m'en vais vous conter, dans l'air du temps donc, mes froides aventures montagneuses.

Comment ça, il fait froid en Australie alors que l'été approche à grands pas ? Et bien... c'est possible ! Si l'on est au "bon" endroit au "bon" moment. Heureusement, les nombreuses randonnées au programme seront là pour nous réchauffer !

Naïf comme deux petits français que nous sommes, nous commencerons par joyeusement nous élancer à l'assault du mont Rufus, 1416 petits mètres, professionnellement équipés de jeans, sweat shirts et tartines de beurre de cacahuète.

Cet élan d'optimisme s'avèrera être une monumentale erreur... Les 13 degrés régnant au point de départ, situé à 800m d'altitude, ne laissaient en aucun cas présager le carnage qui va suivre. En effet, au fur et à mesure que nous progresserons, une mystérieuse substance blanche emplira le paysage. Après investigation, nous réaliserons qu'il s'agit... de NEIGE ! Un mot sorti de mon vocabulaire il y a fort longtemps.

Rouge, vert, noir, blanc... L'arc-en-ciel revisité à la tasmanienne

La situation restera jusque là sous contrôle, le fait de pouvoir jouer comme des enfants de 3 ans dans la neige en Australie étant plutôt amusant. Elle se dégradera un peu lorsque nous réaliserons que les flaques de neige disparates se transformeront en manteau neigeux de plus en plus épais au fur et à mesure que nous gagnerons de l'altitude. Nous nous retrouverons bien vite à marcher dans 60cm de neige, ce qui n'est pas vraiment l'environnement idéal pour deux touristes en jean.

Le chemin deviendra ensuite bien plus pentu, l'ascension à proprement parler commençant ici. Et c'est également ici que commencera le ruissellement des eaux provenant de la fonte des neiges situées au dessus de nous. Tels deux saumons remontant bravement ce torrent (quelle belle métaphore), nous arriverons malgré tout sur la partie supérieure de la crête, complètement trempés. Et quelle surprise nous a gentiment attendu sur la crête ? Un blizzard digne de l'Himalaya pardi ! 5 mètres de visibilité, un vent à décorner les boeufs rendant difficile le simple fait de rester debout et un chemin complètement enseveli sous la neige. On se croirait en train de gravir un 5000, c'est assez surréaliste de penser que nous sommes seulement à 1400m ! Heureusement, des poteaux de marquage fluorescents nous aiderons à rallier le sommet malgré tout, non sans difficulté.

Pour la vue du sommet, je compte sur votre imagination, mes mains ayant été bien trop occupées à essayer de se réchauffer à l'intérieur de mes poches pour prendre des photos... Il n'y avait de toute façon pas grand chose à voir vu la visibilité !


Une fois redescendus et réchauffés, nous nous remettrons en route afin d'atteindre le lendemain le point de départ de la prochaine randonnée, dans le Southwest National Park. Pas de montagne à gravir, une altitude proche du niveau de la mer, un modeste 16km aller-retour afin de rallier le lac Judd, bref, finger in the nose ! Erreur d'appréciation numéro deux...

Point de neige au programme aujourd'hui, mais un élément naturel tout aussi excitant : la boue. Des tooooonnes de boue ! Le sentier se révèlera être un véritable lit de rivière excellant à merveille dans le stockage de l'eau de pluie.


Coralie, transpirant la joie de patauger dans la boue

Sentier de randonnée, ruisseau, canular ? Je vous laisse choisir

Si la randonnée doit j'imagine être assez facile en conditions sèches, il en sera tout autre en cette saison humide. Le jeu consiste à vaguement suivre le cours d'eau tout en slalomant au milieu de la végétation pour trouver un bout de terre ferme où poser nos pieds. C'est assez physique, et l'abandon de Coralie sera malheureusement à déplorer après un peu plus d'une heure du marche. Têtu comme je suis, je déciderai de continuer en solitaire, je n'abandonnerai pas avant d'avoir vu le lac !


Quelques pontons sont heureusement là pour me redonner espoir de me sécher les pieds

Et le ciel bleu est même de la partie, que demander de plus !

Après près de 2h30 de marche, n'ayant aucune idée de mon avancement actuel et réalisant que le lac pourrait encore être très loin, je décide d'abandonner l'idée d'éviter la boue plus longtemps, et me met à l'affronter en marchant en plein dans le sentier-ruisseau. S'enfoncer de 5 à 10 centimètres dans un mélange d'eau et de boue à chaque pas n'est pas la sensation la plus agréable du monde, mais le gain de temps est considérable.

Le ciel se dégageant de plus en plus et le paysage sublime et sauvage m'entourant sont là pour me donner du baume au cœur, tout va bien, quand soudainement, tout bascule... un pas qui était sensé ressembler à tous les autres, sauf que mon pied ne trouvera pas le fond ferme sur lequel il s'attendait à prendre appui, pas même une fois enfoncé jusqu'à la cheville. Non, il continuera à explorer les profondeurs de cette flaque de boue abyssale, qui avalera mes pieds, puis mes chevilles, puis mes genoux... Je me rattraperai par réflexe instinctif aux branches tombant sous ma main, non sans m'enfoncer jusqu'à la taille ! Noyé dans une flaque de boue au beau milieu d'un sentier à l'abandon depuis des lustres... On aurait mit du temps à me retrouver !


Donc non, les flaques de boue d'un mètre de profondeur, ça n'existe pas que dans Vidéo Gag
Heureusement, le prochain obstacle se dressant sur ma route se constituera d'une rivière à traverser, une douche glacée forcée presque bienvenue ! Les 80 centimètres de fond associés au courant assez fort ont été un instant sur le point de me faire faire demi-tour, mais je crois que plus rien n'est capable de me faire renoncer après ce que j'ai enduré pour arriver jusqu'ici !

Et après un peu plus de 4h de marche acharnée, je rallierai non sans fierté l'objectif...


Lake Judd, bordé par de sublimes falaises enneigées. Les conditions climatiques n'étaient pas vraiment propices à faire des photos de qualité, mais qu'importe, ces souvenirs sont gravés dans ma mémoire !

Le sentiment de satisfaction s'évadera peu à peu pour laisser place au désespoir lorsque je commencerai à prendre conscience que 4 nouvelles heures m'attendent avant de rallier le van et de me mettre au sec. L'avantage non négligeable, c'est que je saurai désormais où se trouvent les pièges à éviter. J'arriverai finalement à destination dans un état assez méconnaissable, vous me croirez probablement quand je vous dirai qu'une douche bien chaude ne m'a jamais autant manqué que ce soir là !

Lake Gordon

Russell falls, Mt Field National Park

Quand on conduit de nuit dans un chemin, sous un brouillard intense, et que l'on se retrouve à piler pour éviter de finir coulés au milieu d'un lac... Et bien ça fait un emplacement de camping idéal !

La conduite de nuit d'ailleurs, bien que nous ayons essayé de l'éviter au maximum, a été régulièrement nécessaire afin de boucler notre tour de l'ile en deux semaines seulement. Et la vie animale présente sur les routes la nuit en Tasmanie est assez impressionnante ! Un opossum sera tristement victime de notre roue avant gauche, repose en paix, aussi nuisible sois-tu.

Troisième et dernière grosse rando avant de reprendre le ferry, probablement la plus fameuse de l'ile, l'ascension de la Cradle Moutain. Et croyez le ou non... Tout s'est merveilleusement bien passé pour cette dernière ! Mis à part que j'ai du à regret abandonner à une centaine de mètres du sommet seulement, les 2 mètres de neige présents ne permettant pas, même à un homme aussi bien équipé que moi, de traverser.


À l'abordage de la Cradle !

Des lacs d'un noir opaque contrastant avec le brillant de la neige l'entourant... C'est bô !

Roches typiques de la Cradle Moutain

Pas au sommet, mais presque !












Une sympathique promenade de 8km permet de rallier le point de départ. On aperçoit le sommet en arrière plan, c'est de là que j'viens !

C'est sur cette randonnée de 34km à couper le souffle, autant au sens premier du terme qu'à celui plus imagé de mon ressenti face aux vues impressionnantes observées, que se terminera cette escapade tasmanienne. J'en garderai vraiment un excellent souvenir, entre les paysages variés et toujours aussi beaux, le penchant sauvage de l'ile et la rareté des touristes, les sentiers allant du hardcore à l'aménagé juste comme il faut... Les conditions climatiques très moyennes ne sont rien comparés à tous ces points positifs, et j'espère vivement revenir un jour ici, notamment pour compléter la célèbre Overland walk, marche de 65km traversant les plus beaux paysages de l'ile.

Ça peut paraitre ridicule à l'échelle de l'ile principale, mais on a tout de même parcouru près de 1500 km en Tasmanie !

1 commentaire:

  1. La photo N°9; "Russell falls, Mt Field National Park" est juste splendide.

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