Port Lincoln et ses requins blancs

Enfin un peu d'aventure croustillante à se mettre sous la dent ! Il faut dire que mon quotidien australien est très différent de ce qu'était son homologue asiatique. Fini le temps du dépaysement total dû à l'énorme différence culturelle, les sensations extrêmes quasi-quotidiennes, les températures indécentes et l'oubli de la définition du mot pluie, la possibilité de se doucher tous les jours...

Tout ça s'est envolé pour laisser place à une exploration intense de parcs nationaux, un quotidien jonché de rencontres avec la vie sauvage locale, et une sensation de pauvreté permanente face à ce coût de la vie si élevé quand on ne profite pas en contrepartie des salaires locaux.

Si ces deux façons de voyager diamétralement opposées me plaisent, chacune à leur manière, il est vrai que je me prends à penser qu'une durée de séjour plus courte en terre Océane et quelques mois/pays en plus en Asie auraient rendu ce trip encore plus mieux que parfaitement idéal, et je pèse mes mots ! Mais je ne suis certainement pas du genre à avoir des regrets, surtout en ayant conscience qu'il me reste encore de nombreuses années devant moi pour assouvir tous mes désirs de voyages. Ma seule préoccupation pour l'heure reste donc de profiter à fond de cette aventure australienne !

Trêve de digression, place au menu du jour. Menu qui est très orienté action, puisque le plat principal n'est en effet rien d'autre qu'une plongée en cage au milieu des requins blancs !

Trois endroits dans le monde seulement proposent ce type d'expérience, à savoir Guadalupe (Mexique), Cape Town (Afrique du Sud), et Port Lincoln (Australie). L'idée de laisser passer cette opportunité ne m'a donc point effleurer l'esprit, pas même lorsque j'ai pris connaissance du tarif de 495$ pour 45 minutes de plongée.

Voici donc comment je me retrouve sur le pont supérieur du Calypso Star II, à sympathiser avec les 18 autres personnes de diverses nationalités présentes à bord ce jour là.

La deuxième activité à bord (la troisième si l'on compte l'empiffrage découlant de la présence d'un buffet) consiste à essayer autant que possible de régulièrement fixer l'horizon afin d'échapper au mal de mer que pourraient provoquer les vagues de deux mètres dans laquelle la proue du bateau vient inlassablement se fracasser depuis près de trois heures maintenant.

Le Calypso Star II

Heureusement nous arrivons enfin sur place, les croissants jambon/fromage sont toujours dans mon estomac, tout va bien. L'équipage s'affaire à immerger la cage, déployer les régulateurs destinés à nous permettre de respirer une fois sous l'eau, et libérer quelques litres de sang afin d'attirer les requins.

Peut être aurait-il été préférable de ne pas remarquer la présence d'un morceau entier d'une des grilles déchiquetée sur une vingtaine de centimètres...

Les quelques gouttes de sang ne tarderont pas à rameuter plusieurs squales, leur taille est impressionante même vu d'ici 

On le gentil dauphin... ou pas !

Il est temps d'aller enfiler ma combinaison, les choses sérieuses peuvent enfin commencer. Un mélange d'excitation et d'appréhension que j'apprécie tant commence à m'envahir alors que j'agrippe l'échelle de la cage.

Belle poker face

Le choc est violent dès mon immersion. Aucun lien avec les requins non, mais l'eau glacée qui envahit ma combinaison et pétrifie mon visage me tétanise pendant plusieurs secondes.

Cette sensation s'estompe rapidement, et, alors que la fine pellicule d'eau présente entre ma peau et le néoprène de ma combinaison commence à se réchauffer, je l'aperçois pour la première fois. 4,5 mètres, une mâchoire dans laquelle sont plantées des dents de 8 cm, et deux yeux noirs globuleux, en train de nager calmement à quelques mètres à peine sous mes pieds.

Mes camarades viennent progressivement me rejoindre dans la cage alors que je ne peux détacher mon regard du squale. Seul le violent ballotement de la cage dû aux forts courants marins parviendra à m'en empêcher, mais ce ne sera que mieux recommencer, les requins commençant à affluer de toutes parts.

Total respect aux poissons nageant en parfaite harmonie à quelques centimètres seulement d'une mâchoire si puissante ! 

L'équipage s'affaire en surface à continuellement jeter à la mer des appâts constitués de carcasses de viande, qu'ils drainent ensuite vers la cage. Les requins chargent donc, face à nous, ouvrant au maximum leur mâchoire. Cette vision est vraiment impressionante et restera gravée dans ma mémoire jusqu'à la fin de mes jours.

Il sera même difficile de réfréner ce réflexe de recul que je contracterai à chaque requin s'approchant un peu trop près, certains venant même à entrer en contact avec la cage ! Je pourrais à présent officiellement dire que j'ai vécu un face à face? avec la mâchoire d'un requin blanc, séparés par une trentaine de centimètres d'eau seulement !

Deux coups secs faisant vibrer la cage nous préviennent que le temps nous étant imparti est écoulé. Il s'agit presque d'un soulagement à vrai dire, le froid ayant déjà eu raison de deux plongeurs remontés à la surface prématurément et commençant également à sérieusement abaisser ma température corporelle.

La douche brûlante et le nouveau buffet qui s'en suivront n'en seront que plus appréciable, surtout que le ballotement de l'embarcation sera bien plus faible sur le chemin du retour.

Échange de nos ressentis et visionnage du montage vidéo réalisé par l'équipage seront par conséquent au programme lors des 3h de navigation nécessaires au ralliement du port, lieu où se terminera cette folle journée !

Je terminerai ce billet par un conseil, voire un ordre, si un jour vous avez l'occasion de plonger avec les requins blancs... Foncez !